Soy un silencioso. Me pregunto, gracias a la distancia que
tomo, ahora, de mi vida, si este gusto pronunciado por el silencio no tiene su
origen en la dificultad que, desde siempre, fue mía, la de sentirme de algún lugar.
Antes de conocer el desierto, sabía que era mi universo.
Sólo la arena puede acompañar una palabra muda hasta el horizonte.
Escribir sobre la arena, a la escucha de una voz de otro
tiempo, abolidos los límites. Voz violenta del viento o, inmóvil, del aire, esta
voz le sostiene la mirada. Le anuncia lo que lo agrede o aplasta. Voz de las
abisales profundidades de las que usted sólo es el ruido ininteligible; la
sonora o inaudible presencia.
Si le hiciera falta una imagen a la Nada, la arena nos la
procuraría.
Polvo de nuestras ataduras. Desierto de nuestros destinos.
Je suis un
silencieux. Je me demande, grâce au recul que je prends, maintenant, avec ma
vie,
si ce goût
prononcé pour le silence n’a pas son origine dans la difficulté qui, de tout
temps,
fut la mienne, de
me sentir d’un quelconque lieu.
Avant de connaître
le désert, je savais qu’il était mon univers. Seul le sable peut accompagner
une parole muette
jusqu’à l’horizon.
Écrire sur le
sable, à l’écoute d’une voix d’outre-temps, les limites abolies. Voix violente
du vent ou, immobile, de l’air, cette voix vous tient tête. Ce qu’elle annonce
est ce qui vous agresse ou écrase. Parole des abyssales profondeurs dont vous
n’êtes que l’inintelligible bruit ; la sonore ou l’inaudible présence.
S’il fallait une
image au Rien, le sable nous la fournirait.
Poussière de nos
liens. Désert de nos destins.
Tenía – le parecía – mil cosas para decir
a esas palabras que no decían nada;
que esperaban, alineadas;
a esas palabras clandestinas,
sin pasado ni destino.
Y eso lo perturbaba infinitamente;
al punto de no tener, él mismo, nada más para decir,
otra vez, otra vez.
Il avait – lui
semblait-il – mille choses à dire
à ces mots qui ne
disaient rien ;
qui attendaient,
alignés ;
à ces mots
clandestins,
sans passé ni
destin.
Et cela le
troublait infiniment ;
au point de
n’avoir, lui-même, plus rien à dire,
déjà, déjà.
Canción del extranjero
Estoy en busca
de un hombre que no conozco,
que jamás fue tan yo mismo
como desde que lo busco.
¿Acaso tiene mis ojos, mis manos
y todos esos pensamientos semejantes
a las ruinas de ese
tiempo?
Temporada de los mil naufragios,
el mar deja de ser el mar
transformado en agua helada de las tumbas.
Pero, más lejos, ¿quién sabe más lejos?
Una niña canta sin ganas
y reina la noche sobre los árboles,
pastora entre las ovejas.
Arranca la sed al grano de sal
que ninguna bebida calme la sed.
Con las piedras, un mundo se atormenta
de ser, como yo, de ningún sitio.
Chanson de
l’étranger
Je suis à la
recherche
d’un homme que je
ne connais pas,
qui jamais ne fut
tant moi-même
que depuis que je
le cherche.
A-t-il mes yeux,
mes mains
et toutes ces
pensées pareilles
aux épaves de ce
temps ?
Saison des mille
naufrages,
la mer cesse
d’être la mer
devenue l’eau
glacée des tombes.
Mais, plus loin,
qui sait plus loin ?
Une fillette
chante à reculons
et règne la nuit
sur les arbres,
bergère au milieu
des moutons.
Arrachez la soif
au grain de sel
qu’aucune boisson
ne désaltère.
Avec les pierres,
un monde se ronge
d’être, comme
moi, de nulle part.
Abandoné una tierra que no era la mía,
por otra, que tampoco lo es.
Me refugié en un vocablo de tinta, que tenía
al libro por espacio
Palabra de ningún sitio, siendo aquella oscura
del desierto
No me cubrí durante la noche.
No me protegí
del sol.
Caminé desnudo.
De donde venía no había más sentido.
Donde iba a nadie preocupaba.
Del viento, le digo, del viento.
Y un poco de arena en el viento.
J’ai quitté une
terre qui n’était pas la mienne,
pour une autre,
qui non plus, ne l’est pas.
Je me suis
réfugié dans un vocable d’encre, ayant le livre pour espace,
parole de nulle
part, étant celle obscure du désert.
Je ne me suis pas
couvert la nuit.
Je ne me suis
point protégé du soleil.
J’ai marché nu.
D’où je venais
n’avait plus de sens.
Où j’allais
n’inquiétait personne.
Du vent, vous
dis-je, du vent.
Et un peu de
sable dans le vent.
Edmond Jabès - Egipto, El Cairo, 1912-París, Francia, 1991
Traducción de Carolina Massola
Qué belleza! Gracias!
ResponderEliminarGracias a vos por tu comentario!
ResponderEliminarla extranjeridad, el desierto... esos temas que nos hacen sentir. Y la sutileza de la traducción!! Gracias
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